PublicitéQJ juin 2022

La machine à remonter le temps au Vieux domaine

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Le vieux domaine, à la ravine-des-cabris, raconte deux siècles de la réunion. es-tu prêt pour un cours d’histoire grandeur nature avec une classe de cp ? c’est parti !

Sheldon, Ismaël, Doulcey ou Sébastien ne connaissent pas grand-chose de l’engagisme, ni même de l’esclavage. Et encore moins de l’art de tailler les bardeaux, de blanchir le linge ou de moudre le maïs ou de cultiver le café. Les enjeux de l’histoire agricole et de la politique sucrière de leur île ne les intéressent pas. Et les arbres endémiques, ils ne savent pas trop ce que c’est. Le hand spinner, par contre, ça leur parle direct. Normal, en CP.

vieux domaine

Les propriétaires actuels ont ouvert le Vieux Domaine au public
il y a vingt ans, avec l’association « Jardin Bourbon et Traditions ».

 

Et pourtant, dès les premières minutes de visite, ils kiffent la visite et bombardent de questions les deux guides du Vieux Domaine, Audrey et Sophie. Les deux fées souriantes en robes créoles traditionnelles ont une patience d’ange et l’habitude de répondre aux questions les plus bizarres.

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Un alambic, ça marche comment ?

 

Avec leur institutrice, Mme Herbassier, les marmays de CP de l’école Pierre-Cadet,à l’Étang-Salé, ont travaillé sur la vie lontan, ses objets, ses métiers disparus… Cette visite, c’est la leçon d’histoire grandeur nature qui récompense leurs efforts !

Pas d’insecticides
vieux domaine

Après avoir étudié le patrimoine lontan en classe,
les CP sont prêts pour la visite

« Pourquoi tu fais du feu ? », demande un marmay en s’approchant d’un peu trop près du chaudron. « Pour éloigner les moustiques », répond Sophie en s’interposant, « parce qu’ici, comme on fait de l’agriculture bio et qu’on a des ruches, eh bien on n’utilise pas d’insecticide sinon ça tue les insectes».

Beaucoup ont entendu les adultes autour d’eux parler du fameux Vieux Domaine de la Ravine des Cabris, qui a rouvert ses portes en avril après quatorze années d’interruption pour travaux. Mais pour tous, c’est la première visite dans ce lieu né en… 1802 !

« Pourquoi il avait un bocal à serpent, le tisaneur ? C’est quoi un goni ? C’est le kalou ou le pilon, ça ? Comment ça pousse, le café ? Pourquoi on s’éclairait avec du pétrole ? Ils étaient comment les gens qui vivaient là ?» La mitraillette à questions ne s’arrête pas. « Ici, il y avait plein d’enfants comme vous », lance Audrey, « et ils sont devenus les mémés et les pépés de vos mémés et de vos pépés! » Le genre de phrase qui fait réfléchir !

Métiers lontan
vieux domaine

Le noni sent «le vomi de chien » ou « le vieux camembert »,
selon les marmays

Les petits courent partout, ravis de découvrir en plein air les métiers lontan. Les différentes paillotes qui composaient le village des engagés, il y a plus d’un siècle, ont été remises dans leur état de l’époque : le bardeautier, le charretier, le tisaneur, la modiste, le forgeron, ou encore le minotier, «celui qui broyait le maïs ». A côté de son moulin, qui date de 1850, le café séchait au soleil sur l’argamaste.

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130 espèces d’arbres fruitiers se cachent dans le jardin !

 

La boutique de « Totor » a un franc succès. On découvre les denrées stockées dans les sacs gonis, à terre. La guide explique qu’autrefois, il n’y avait pas d’emballage : on vendait tout à l’unité, à la pesée ou à la moque. « C’était bien, ça faisait moins de pollution», note un petit garçon, qui s’exerce à compter sur le boulier chinois.

Ils aiment découvrir ce passé tout récent, encore chaud, subtilement mis en scène. Sophie la guide, montre comment encaustiquer un parquet avec la brosse coco au pied, manier le « caro » – le lourd fer à repasser – ou garder le linge éclatant grâce au bleu de méthylène. Des tas de mots anciens se réveillent !

Le plein de nouveaux mots
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Magie des objets de la vie lontan, comme cette lampe à pétrole.

Côté jardin, on passe du cours d’histoire aux SVT pour apprendre les arbres endémiques, la culture du café, l’apiculture. Dans le verger, 130 espèces différentes d’arbres fruitiers font entrer plein de mots nouveaux dans les crânes : goyave bonbon, bilimbi, durian, mangoustan, ananas le diab’, noisetier de Guyane, caïmitier, mambolo, sapote blanche, pamplemousse-poire, coing de Chine, orangine, chupa, feijoa, jamalac, jaboticaba, graine bourrique…

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Un « caro », ça pèse lourd !

 

Bref : la visite, aussi émouvante qu’instructive, rappelle deux choses : primo, les jeunes d’aujourd’hui et même leurs parents ont oublié le passé. Deuxio, l’histoire est une matière super agréable à apprendre dans ce genre d’endroit, sous la forme d’un jeu de piste à la recherche du tan lontan. Le chaînon manquant entre l’école et les marmays!

Textes et photos : Stéphanie Buttard


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